La suite des aventures de Marine Drouilly dans le cadre Karoo Predator Project :
Depuis notre dernier article, l’hiver est passé en Afrique du Sud et l’été pointe à nouveau le bout de son nez. Avec lui, le temps de retirer les colliers GPS posés sur les carnivores durant les mois de mars, avril et mai.
Pour ce faire, il faut « communiquer » avec les colliers GPS par le biais d’internet et de satellites. C’est la technologie Iridium, absolument révolutionnaire pour les chercheurs menant des projets en écologie spatiale. Plus besoin de suivre nos animaux à pied avec une antenne encombrante. Nous recevons directement les données chez nous par internet. Pour retirer les colliers, encore mieux ! Ils ont tous été munis de drop-off, un petit système permettant de déclencher à distance, toujours via internet et les satellites, l’ouverture du collier. Plus besoin de recapturer l’animal.
Ces deux derniers mois, j’ai donc déclenché les colliers qui étaient aux cous des caracals Jumbo, Whisky et Rooibos et ceux des chacals Luna et Eskimo, capturés dans la Réserve d’Anysberg. Malheureusement, je n’ai pas eu à déclencher les colliers de Pluto et de Fynbos, deux chacals capturés à Anysberg, qui se sont fait prendre dans des pièges à mâchoires posés en périphérie de la Réserve par des éleveurs. Triste perte, d’autant plus grande que nous perdons aussi des données importantes qui nous permettraient de mieux comprendre l’écologie spatiale des chacals et de pouvoir trouver des solutions au conflit. Tous les éleveurs ne semblent pas être de cet avis, même si la majorité nous soutient…
Les autres colliers sont bien tombés – certains dans des zones difficiles d’accès ! – et nous avons pu tous les récupérer. Une fois les colliers au sol, nous notons le dernier point GPS recensé, puis sur le terrain, nous utilisons la fameuse grande antenne pour repérer exactement l’emplacement du collier qui émet un signal VHF. Généralement, les colliers des chacals sont en terrain découvert et plat et la tâche est aisée. En revanche, les félins nous donnent du fil à retordre avec des colliers qui tombent dans des falaises, au milieu de buissons touffus et épineux ou encore au sommet de montagnes escarpées et recouvertes de gros rochers.
Peu importe, l’équipe est entraînée et tous les colliers ont été retrouvés. Il s’agissait aussi de visiter les derniers groupements de points GPS indiquant peut-être l’emplacement d’une proie tuée par l’un de nos animaux suivis. C’est ainsi que nous avons retrouvé les restes de varans et de protèles tués par des caracals, un terrier de chacal et quelques carcasses de … moutons. Eh oui, nous n’oublions pas que nous étudions les conflits. Cependant, les éleveurs restent positifs vis-à-vis du projet du fait des bonnes relations que nous entretenons ensemble, du dialogue toujours ouvert et des nouvelles connaissances qu’ils acquièrent, notamment grâce aux colliers GPS.
Et du côté des primates ? Marion a du travail !
Les babouins ne sont habituellement pas des prédateurs et se nourrissent principalement de baies et de jeunes pousses, mais en période de disette certains individus opportunistes attaquent les agneaux, parfois en grand nombre, pour le contenu de leur estomac (lait). Les babouins sont donc perçus comme nuisibles par les éleveurs et plusieurs centaines sont tués chaque année dans les fermes du Karoo central.
Les premiers mois de terrain ont permis d’interroger les éleveurs pour mieux comprendre et cartographier le conflit afin de repérer les zones sensibles, et d’identifier les pratiques ou les caractéristiques du paysage pouvant favoriser les attaques de troupeaux. Marion est également en train d’étudier les mouvements des babouins puisque les premiers colliers GPS ont pu être posés grâce au soutien des fermiers, sensibilisés en amont par le travail mené sur les carnivores.
Les photographes reporteurs qui sont venus photographier le travail du Karoo Predator Project – Nathalie Houdin et Denis Palanque – seront présents à Montier en Der pour parler de leur travail photographique dans le Karoo et vous emmener en coulisse de leur reportage. Venez les rencontrer aux conférences Canon du 19 au 22 novembre 2015.